[Même si la revue Variations dans laquelle écrit l'auteur Alexander Neumann est reliée aux Négrisme[1], auquel nous ne souscrivons pas, nous republions néanmoins ce texte intéressant écrit en juillet 2009, peu après la formation du NPA / Dissolution de la LCR, et à replacer dans ce contexte pour sa pertinence. [1]Voir aussi "Le Négrisme, une conte-révolution de gauche" chez Mutines Séditions]
Voici trente ans, Michel Foucault posa la question de savoir, comment nous pouvions nous « débarrasser du marxisme », ce poids doctrinaire du siècle passé, tout en maintenant une critique émancipatrice [2]. Ici, je ne cherche pas à rassurer les marxistes doctrinaires, grâce à un discours moraliste ou passionnel, qui voudrait liquider l’héritage libertaire de Marx, mais au contraire à les déstabiliser. Il s’agit de déconstruire le marxisme en tant qu’un dispositif historique qui entrave les capacités d’action autonomes des individus ou collectifs. Il s’agit de se libérer d’une tradition idéologique et institutionnelle refroidie. Aujourd’hui, la forme maintenue de ce problème s’exprime dans le trotskysme [3].
Au vu du spectacle livré par un énième parti d’extrême gauche, qui se prétend comme d’habitude « nouveau », et face à la décomposition prolongée des anciens partis ouvriers, en Europe et ailleurs, les arguments critiques qui interrogent les marxismes doctrinaires restent d’une inquiétante actualité. Tout se passe comme si la répétition l’emportait encore sur la création, la pulsion de vie et la différence.
Le trotskysme, héritier sans héritage du communisme soviétiqueLa tradition trotskyste s’est définie dans un rapport complexe au marxisme soviétique, aux partis communistes et aux Etats dits « socialistes », qui n’étaient que des dictatures bureaucratiques comme tout le monde le sait aujourd’hui. En pratique, les trotskystes ont été travaillés par un mouvement contradictoire d’attraction-répulsion envers la tradition soviétique, qui a freiné la déconstruction critique du léninisme avec son cortège d’effets autoritaires. La tradition trotskyste réclame l’héritage de la Révolution russe sans assumer son bilan global.
Trotsky et les trotskystes se définissent, comme le nom le signale, d’une certaine conception de la révolution russe qui culmine dans la prise du pouvoir par un seul parti. Ce modèle, présenté comme une référence positive, tait sa complémentarité désastreuse : « On parle peu des effets ravageurs de la guerre civile sur la culture politique du bolchévisme, de la tendance à voir dans la violence systématisée et organisée en instrument privilégié et pour transformer les rapports sociaux, et dans le volontarisme du parti et de l’Etat un moyen essentiel des masses populaires. » [4]
Confrontés aux crimes de
Staline et au bilan négatif de l’Union soviétique avant son implosion, les trotskystes se présentent comme les premiers critiques et les opposants historiques à ce système de domination. La répression violente qui a frappé
Trotsky et ses soutiens, orchestrée par les partis communistes, semblent confirmer cette idée. Si cette opposition est frontale en 1938, les frontières politiques et idéologiques s’avèrent pourtant nettement plus mouvantes à d’autres moments...
Jusqu’en 1924, le soutien du chef de l’Armée rouge à son Etat est sans faille ;
Trotsky assure et assume la répression sur tous les plans, y compris contre les oppositions de gauche (Cronstadt, etc.).
Après être entré en opposition frontale au pouvoir stalinien, le courant trotskyste continue à défendre l’Union soviétique, de façon inconditionnelle.
Pendant la guerre froide, le trotskysme international se déchire sur la question de savoir s’il faut entrer dans les partis communistes nationaux.
La IVe Internationale défend sans faille le régime cubain pro-soviétique [5], puis l’invasion militaire de l’Afghanistan par les troupes soviétiques en 1979 (la direction de la
LCR française est alors désavouée sur ce point par une majorité d’adhérents). Pendant tout ce temps, la référence positive à la révolution russe amène des discussions incessantes et irrésolues sur la date, à partir de laquelle la Russie soviétique aurait trahi les idéaux communistes, puis sur la nature politique du régime soviétique. Le jargon trotskyste évoque des « Etats ouvriers dégénérés » et parie jusqu’au dernier moment sur une révolution ouvrière contre les Etats bureaucratiques, en attendant Godot.
Les réformes amorcées par Gorbatchev, en 1985, relancent un temps le trotskysme allemand, à l’Est et à l’Ouest du pays, avant qu’une large majorité de citoyens de l’Allemagne unifiée ne plébiscite un gouvernement nationaliste de droite. Cela n’empêche pas Ernest Mandel, l’un des théoriciens trotskystes les plus connus, d’annoncer une révolution prolétarienne en Europe de l’Est, en 1990.
Par la suite, de nombreux groupes trotskystes concurrencent les partis communistes classiques sur leur propre terrain, celui de l’héritage communiste et de la tradition léniniste, en brandissant le drapeau rouge. Ainsi, Daniel Bensaïd dénonce avec verve l’abandon de la faucille et du marteau par le
PCF en janvier 1994, dans l’hébdomadaire Rouge, tout en insistant sur la pertinence de la dictature du prolétariat (référence que la
LCR n’abandonne qu’en 2003) [6]. En 1993, la direction de LO sanctionne aussi des adhérents qui ont osé mettre en question le discours pathétique des « Etats dégénérés ».
Au fond, les légendaires dissensions sectaires entre fractions trotskystes rivales semblent davantage motivées par des désaccords tactiques ou conjoncturels que par des ruptures de principe.
Avec un certain recul, la critique trotskyste du communisme soviétique paraît peu radicale et aléatoire, comparée à d’autres positions, portées des courants libertaires ou anarchistes de Daniel Guérin à John Holloway, par l’Ecole de Francfort, Socialisme ou Barbarie, l’Internationale situationniste et aux analyses proposées par la revue Futur antérieur, suite à la chute du mur.
L’exception françaiseL’internationalisme affiché des trotskystes, assis sur l’optimisme d’une révolution mondiale attendue et sur le refus du socialisme national de
Staline, cache mal à quel point chaque parti s’inscrit dans l’histoire singulière de son pays, au Brésil, au Sri Lanka ou en France, seul pays au monde où les amis d’
Arlette Laguiller ont une existence politique. Cette spécificité nationale n’a rien de fortuit, mais doit être replacée dans l’histoire française, où le trotskysme apparaît globalement comme une fraction du mouvement communiste dominant.
Depuis la Libération jusqu’à l’effondrement de l’Union soviétique en 1991, le
PCF a marqué le champ politique et syndical à travers son discours marxiste-léniniste, en tant que principal parti de gauche. Il convient de souligner ici que le
PCF était l’un des partis communistes les plus staliniens du monde, appliquant les recettes dogmatiques de la centrale de Moscou avec un zèle singulier. La gauche socialiste ou indépendante était marquée par l’hégémonie communiste à tel point qu’elle se définit comme « non-communiste » jusqu’aux années 1990. Le
PCF prime électoralement jusqu’en 1981, et se maintient encore plus longtemps sur le plan des discours, cultures politiques et modèles militants, à travers le communisme municipal et la CGT. Jusqu’aux années 1980, la majorité des adhérents du syndicat est aussi membre du
PCF [7]. La tradition semble s’arrêter avec les 1,9 % que le
PCF obtient aux élections présidentielles de 2007, mais elle se recycle à travers l’activisme trotskyste.
L’extrême gauche léniniste ne pouvait pas échapper à cette influence sociale, si bien que les dirigeants trotskystes historiques ont été formés par des responsables du
PCF (p.ex.
Pierre Lambert, Hardy) s’ils n’étaient pas des militants du parti avant d’en être exclus (p.ex.
Alain Krivine, Daniel Bensaïd). Le noyau initial de la
LCR provient d’une scission de l’organisation étudiante du
PCF qui se produit en 1966. La socialisation personnelle des responsables trotskystes amène la reproduction d’un certain modèle militant, issu du mouvement communiste, qui a valorisé la discipline, l’engagement à temps plein, l’ouvriérisme masculin et l’autoritarisme. Certes, la
LCR s’est montrée plus permissive que
LO à certaines impulsions issues de Mai 68, notamment au féminisme. De même, le courant lambertiste (celui qui a formé Lionel Jospin) a été davantage anti-communiste que d’autres, ce qui explique peut-être son faible développement. Ces écarts ne sont cependant pas plus importants que les dissensions entre les différents courants qui cohabitent au sein du Parti socialiste.
Vu avec un certain recul, les courants trotskystes français sont pris dans une tendance historique, au sein de laquelle elle ne fait que surnager, car sur le long terme, l’influence de la famille communiste (
PCF-
LO-
LCR) qui veut se mesurer elle-même à l’aune des scores électoraux, passe de 22 % en 1969 à 17 % en 1981, à 13 % en 2002 et à 8 % en 2007 aux élections présidentielles ; c’est-à-dire que les soubresauts des candidatures trotskystes profitent du déclin structurel de l’influence du
PCF sans être en mesure de le compenser. Leur score cumulé dépasse à peine 5 % en 2007. Cette tendance lourde coïncide avec l’érosion de la classe ouvrière industrielle, dont les centres d’activité et les modèles de mobilisation se sont défaits depuis 1978. Les « européennes » ne contredisent en rien ce manque de dynamique, d’autant que ces élections se caractérisent par une baisse tendancielle du taux de participation. En 1999, les listes trotskystes
LO/LCR comptent 900.000 voix et ceux du
PCF élargies à d’autres mouvances 1.200.000. En 2009 on constate 1 million de voix trotskystes et un autre million pour les listes du
PCF, élargies aux dissidents socialistes. Rien n’a bougé au fond, malgré les efforts électoralistes des uns et des autres.
En somme, le trotskysme constitue autant une rupture publique avec la tradition communiste française du
PCF qu’il en perpétue les traits principaux sur le plan symbolique et organisationnel. C’est pourquoi il nous semble trop léger de faire table rase du passé, en l’absence d’un bilan critique, et de faire mine que tout commence à zéro, comme le suggère le sigle NPA. Tout doit changer pour que rien ne change.
Le maintien d’un dispositif léniniste : le parti a toujours raisonAujourd’hui, la plupart des courants trotskystes sont en train d’abandonner la référence explicite au modèle léniniste, en la gommant de leurs programmes de façon assez pragmatique. Comme l’objet de l’héritage a disparu avec l’Union soviétique et les partis communistes de masse, le jargon léniniste est effectivement devenu désuet. Le problème nodal subsiste pourtant, car ce renoncement rhétorique ne s’appuie pas sur une analyse critique cohérente. La répétition des problèmes de passé se passe d’un discours explicite et d’une écriture formelle.
En effet, l’une des concrétisations institutionnelles du discours léniniste est l’organisation d’un parti centralisé, qui est toujours supposé éclairer et diriger les « masses laborieuses ». Les écrits de
Lénine et de
Trotsky se basent sur une analyse cruciale, selon laquelle les ouvriers ne seraient pas en mesure de s’organiser autour de principes socialistes tout seuls, tout au plus capables d’un vague syndicalisme de base [8]. Pour accéder à une conscience politique globale, ils auraient par conséquent impérativement besoin d’un parti qui les guide et d’une direction communiste éclairée. Ce schéma comporte des aspects autoritaires, élitistes et bureaucratiques qui ont souvent été critiqués, et contredits par la réalité de mouvements auto-organisés, mais il a été maintenu jusqu’à aujourd’hui, à travers les organisations trotskystes. Rosa Luxembourg, Erich Mühsam et d’autres avaient constaté, contre
Lénine, que la démocratie des conseils ouvriers était opposée dans son principe à la direction des citoyens par un parti unique, à travers l’Etat. L’histoire lui a donné raison et le principe démocratique du contre-pouvoir a été actualisé avec une grande force théorique par des auteurs comme Jean-Marie Vincent, John Holloway et Oskar Negt [9]. Les dirigeants trotskystes, issues de la tradition léniniste, ne veulent pourtant rien entendre qui pourrait mettre en doute l’existence des partis qui déterminent toute leur vie. Ils font donc le choix de contrer les expériences et mouvements de démocratie directe qui échappent à leur contrôle.
En contrepoint, les partis trotskystes combattent les propositions politiques alternatives, par exemple la forme mouvementiste, fédéraliste ou anarchiste.
Le mode d’action des zapatistes mexicains, qui se passe d’instances centrales, n’est pas plus accepté comme référence politique que d’autres mouvements sociaux qui refusent formellement de s’identifier à un parti central. Au mieux, ces mouvements sont ignorés, s’il ne font pas l’objet de commentaires sectaires dans la presse trotskyste.
Aussi, les partis trotskystes et marxistes-léninistes ont tous raté l’amorce de Mai 68, à la manière du
PCF, comme les précis d’histoire le montrent jusqu’au moindre détail. Le féminisme américain et le MLF se créent aussi contre la résistance initiale des directions trotskystes. Plus récemment, la révolte zapatiste de 1994, le soulèvement démocratique argentin de 2001, les « manifestations du Lundi » allemandes de 2003, le mouvement des sans-papiers de 1996 s’organisent sans leur concours, à leurs débuts sinon complètement.
Rappelons aussi que chacun des petits partis trotskystes français veut être le centre d’un vaste mouvement populaire mondial, en appelant à la création d’un nouveau parti, sans la participation d’autres courants que le sien.
Arlette Laguiller lança son « parti des travailleurs » en 2005, avant de le saborder face aux effets déstabilisants que le mouvement de sympathie exerça sur l’appareil de
LO. Le
PT lambertiste se transforma en nouveau
« parti ouvrier » en 2007 et la
LCR s’est rebaptisée
« Nouveau parti anticapitaliste » en 2009 sans remplacer son noyau de direction.
Ce dernier courant a pratiqué, avec un certain succès médiatique, l’abandon successif des termes « Etat ouvrier », « dictature du prolétariat », « bureau politique », puis des sigles « trotskysme » ou « communisme ». Cela ne signifie pas l’abandon d’un modèle d’organisation traditionnel. Bien au contraire, le maintien de pratiques inchangées, désormais privées du souvenir de leur signification symbolique, encourage la reproduction et la répétition des structures du passé : exclusion des opposants, sectarisme idéologique, reproduction de l’appareil directorial. Comme cet abandon rhétorique n’est pas soutenu par un travail de deuil, par une déconstruction critique, il n’interdit en rien que ne se répètent pas les phénomènes dictatoriaux du passé, qui ont signé l’échec du communisme soviétique. Dans un registre similaire, on peut penser que Lionel Jospin n’a pas changé son comportement politique autoritaire, bureaucratique et rigide, qui provient de sa formation trotskyste-lambertiste, depuis qu’il a cessé de se réclamer de cette tradition. Il pense toujours avoir raison. [10]
Une conscience de classe fantasmagoriqueL’un des problèmes fondamentaux du trotskysme est la quête d’une conscience de classe introuvable. La conscience de classe permet l’émancipation universelle de l’humanité. Formulée sur un plan philosophique par
Marx, puis
Lukacs, il s’agit d’un concept utopique, donc prometteur, mais qui ne se base pas sur une réalité sociale empiriquement saisissable.
Le problème est qu’aucun mouvement social ou critique connu, pas même la révolution russe, ait permis d’expérimenter cette jonction historique, qui paraît aujourd’hui encore plus improbable qu’à l’époque de
Lénine. Le philosophe marxiste
Lukacs a lui-même souligné que pareille conscience de classe ne pouvait pas être décelée dans les luttes réelles des prolétaires ou d’autres révoltés, mais que cette vision impliquait un rejet global du monde existant [11]. Chez
Lukacs et les premiers dirigeants communistes, le parti doit jeter le pont, entre les « masses » révoltées et une « direction » éclairée, chargée de réaliser le concept de l’émancipation humaine. Cette conception, peu tournée vers l’expérimentation démocratique autonome des citoyens, est ensuite « actualisée » par
Ernest Mandel, qui admet que le rôle central du parti a déjà été souligné par les premiers sociaux-démocrates, qui le justifient alors par la faiblesse culturelle des masses ouvrières [12].
Lénine ne fait que radicaliser ce principe autoritaire du parti, qui s’organise autour d’un « chef charismatique » (citation de
Max Weber) et sur la base d’une « action soumise et commandée » [13].
Les porte-paroles trotskystes illustrent ce principe, avec leur style souvent emphatique, dénonciateur ou moraliste (
Olivier Besançenot, Arlette Laguiller), qui donne l’impression qu’ils soient investis d’une mission. Héritier du léninisme, le trotskysme pense que ses partis véhiculent les rudiments d’une conscience de classe qui doit être diffusée en direction des opprimés. La direction trotskyste incarne en quelque sorte cette conscience supérieure.
Une contradiction insurmontable naît de cette construction politique : d’un côté, les trotskystes veulent mobiliser les « prolétaires » (ouvriers, précaires, femmes, jeunes, immigrés...) à partir de leur sentiment de révolte, face à une réalité vécue comme insupportable, mais de l’autre côté, ils sont convaincus que cette mobilisation n’amène pas la conscience de classe, selon leur propre théorie marxiste. Sinon, à quoi servirait leur parti avec ses mécanismes de centralisation, de sélection et de formation des militants et cadres ?
La contradiction éclate dans leur pratique politique, quand les organisations trotskystes tentent de partir des revendications urgentes des opprimés, afin d’arriver à l’organisation de mouvements de protestation suffisamment larges pour provoquer des effets politiques au niveau de l’Etat, en partant ainsi du « bas » vers le « haut ».
Arrivé au stade d’une crise politique majeure, telle la grève générale de juin 36 ou de Mai 68, cette démarche rencontre sa propre limite doctrinaire et se trouve soudain inversée ; maintenant, ce n’est plus l’expérience vécue des opprimés et leur capacité de s’affirmer en contre-pouvoir, mais la direction du mouvement et la question du pouvoir qui est au centre du dispositif trotskyste. L’objectif étant le contrôle de l’Etat. Cela au nom de l’émancipation et de la conscience de classe, que les ouvriers ne sauraient pas atteindre par eux-mêmes, selon
Lénine et
Trotsky (ceci malgré la phrase finale du Manifeste communiste de
Marx en 1848, influencé par la charge anarchiste de la Ire Internationale, et qui souhaite que « l’émancipation des travailleurs sera l’œuvre des travailleurs eux-mêmes »).
Une conceptualisation alternative à cette vision léniniste a été formulée par des penseurs de la Théorie critique,
Oskar Negt et
Alexander Kluge. Ils cherchent à saisir la façon dont les dominés peuvent organiser leur propre prise de parole, qui permette une discussion et un échange des différentes expériences de la vie, afin de nommer les raisons de la révolte. Ainsi, on passe d’une subjectivité rebelle à un espace public oppositionnel qui se passe du parti unique et des instances de l’Etat. [14]
Marx à l’encontre du marxisme doctrinaireLa critique du modèle suiviste et autoritaire que constitue « le parti ouvrier » débute dès sa naissance, puisque
Karl Marx,
Rosa Luxembourg et le sociologue critique
Roberto Michels l’ont explicitement abordé [15]. Dans sa célèbre
Critique du programme de Gotha du parti ouvrier allemand,
Marx fustige déjà l’idéologie du marxisme doctrinaire [16]. Il dénonce tour à tour trois principes qui se trouveront ensuite au fondement du dispositif léniniste-trotskyste :
l’ouvriérisme, l’étatisme et le productivisme.
L’ouvriérisme marxiste est explicitement critiqué par
Marx sous un triple aspect. D’abord, parce que l’émancipation des travailleurs ne saurait être envisagé dans le cadre de l’idéologie servile de la « valeur-travail », qui soutient la fierté du travail subalterne, là où
Marx propose une critique radicale du salariat. Dans le même essai, l’auteur du Capital rejette aussi l’idéologie ouvriériste qui prétend que la classe ouvrière industrielle puisse s’affirmer contre les classes moyennes, dont il souligne au contraire le potentiel révolutionnaire. Enfin,
Marx se moque du travail idéologique simpliste des marxistes de parti, qui ne correspond pas à une critique intellectuelle de fond.
Marx conspue ensuite l’étatisme des marxistes de son époque, qui s’accompagne d’une focalisation sur le cadre de l’Etat-nation et d’un internationalisme purement rhétorique qui apparaît dans l’appel à « la fraternisation des peuples ». Cette démarche simpliste « est encore infiniment au-dessous de celle du parti du libre-échange » selon
Marx, ce qui fera plaisir aux porte-paroles du marxisme français qui ont vanté « l’Europe des peuples », lors du référendum national de 2005.
Marx insiste au passage sur le fait que l’idée d’un « Etat libre » est une contradiction en soi, absurde. Voilà pourquoi ce texte nodal de Marx est soigneusement évité par les marxistes de tous bords, voilà pourquoi
Marx affirmait « Je ne suis pas marxiste ! »
L’échec historique du programme trotskysteTrotsky et les trotskystes ont imaginé un scénario pour prendre la direction du mouvement ouvrier, au moment de la seconde Guerre Mondiale. Il s’agit du célèbre « programme de transition » de 1938 [17]. Les revendications sociales et politiques qu’il contient sont tellement audacieuses que leur réalisation implique l’explosion du cadre capitaliste des sociétés concernées.
Historiquement, cet échafaudage idéologique et politique a manifestement échoué, bien que le programme fondateur soit encore publié et utilisé par les trotskystes actuellement.
Les moments de grave crise que les sociétés européennes et asiatiques ont connu à la suite de la seconde grande guerre se sont vite résorbées, grâce au rétablissement de l’Etat qui a été soutenu par la classe ouvrière. Notamment en France, en Italie et en Allemagne, où le pouvoir patronal et étatique était complètement défait, alors que les citoyens se sont finalement contentés de reconstituer les fondements traditionnel de la société, entre 1944 et 1949. Au même moment, l’Armée de Mao a rétabli le pouvoir en Chine, ce qui a ensuite permis le développement capitaliste du pays.
Cela montre bien que la conscience de classe et la mission historique que s’assignent les directions trotskystes correspondent à une fantasmagorie.
Rien ne prouve mieux cette dimension fantasmée de l’idéologie trotskyste que la fin de l’Union soviétique. La théorie des Etats ouvriers dégénérés, en vigueur jusqu’à une date récente, voulait que les Etats soviétiques (Russie, Europe de l’Est) conservent un potentiel émancipateur depuis la révolution d’Octobre, via le parti communiste qui a édifié cet Etat.
Les masses se révolteraient contre les élites bureaucratiques de la Russie et accompliraient la promesse de la révolution prolétarienne. En réalité, l’Etat soviétique s’est écroulé en 1991, dans la plus grande indifférence, et la société russe a supporté la privatisation complète des biens de l’Etat « ouvrier » sans réaction significative. En Allemagne de l’Est, le régime pro-soviétique a implosé en 1990 et une large majorité de citoyens et d’ouvriers a voté pour un gouvernement de droite qui a organisé le démantèlement des dispositifs dits « socialistes ». Pire, la première vague de mécontentement face aux privations matérielles que cette transformation a entraîné, dans l’ancien espace soviétique est-européen, a abouti à un vote protestataire en faveur des anciens chefs bureaucratiques, qui se sont contentés de rebaptiser leurs partis (p.ex. « social-démocrate » au lieu de « communiste »).
Un dernier aspect problématique concerne le vote potentiellement réactionnaire des ouvriers et des classes populaires, qui se manifeste de façon cyclique en France et ailleurs. Le dernier exemple en date est le vote ouvrier majoritaire des ouvriers du Nord en faveur de Nicolas Sarkozy aux présidentielles de 2007. Sans parler des scores élevés du FN parmi les catégories populaires, entre 1986 et 2007. Un autre aspect concerne les grèves ouvrières britanniques en faveur de l’embauche prioritaire des travailleurs nationaux. Ces phénomènes montrent que les motivations politiques répondent à d’autres critères qu’aux seules conditions socio-économiques « de classe », chose que la tradition marxiste a du mal à admettre. L’adhésion populaire aux idées réactionnaires, nationalistes ou fascistes y est systématiquement relativisée.
Trotsky lui-même a interprété le nazisme allemand comme un phénomène « petit-bourgeois », alors que les dernières élections libres avant la dictature nazie montrent un vote populaire en faveur des droites qui ont soutenu Hitler. [18]
L’école de Francfort a réalisé de vastes enquêtes sociologiques sur ce phénomène, connues sous le titre des
Etudes sur la personnalité autoritaire (livre de Theodor Adorno) et qui décrivent de façon très précise, comment les réactions autoritaires à la crise sociale peuvent motiver l’adhésion à des idées racistes, anti-sémites, nationalistes ou fascistes chez différents individus, indépendamment de leurs statuts sociaux ou de classe [19]. Ces études n’ont jamais été discutées sérieusement par les marxistes français. Cela ne doit pas étonner, étant donné que ces partis mystifient la « conscience de classe ».
Selon la logique trotskyste, la crise capitaliste du début des années 1930 aurait dû favoriser une prise de conscience et la révolution prolétarienne, sous la direction des trotskystes. À la place, il y a eu Auschwitz. Hiroshima. Puis, la société de consommation.Un parti pris qui refuse l’expérienceEn conséquence, les trotskystes sont autant fâchés avec la réalité empirique qu’avec les théories critiques. Toutes deux mettent en question le fondement doctrinaire du parti qui organise leur existence, et parfois leur statut social.
Si les dirigeants trotskystes préfèrent contrer les mouvements démocratiques et les conceptualisations critiques qui n’entrent pas dans leur propre schéma idéologique (au lieu d’entrer dans un dialogue de type dialectique), cela est lié à leur incapacité programmatique de tenir compte de l’expérience des autres.
Tout comme ils refusent de prendre en charge l’expérience historique : les victoires fascistes grâce au soutien partiel des ouvriers ; le rétablissement rapide des sociétés capitalistes après la seconde Guerre ; l’existence de mouvements de contestation sans leur concours ; l’implosion sans suite de l’Union soviétique ; le vote potentiellement réactionnaire des catégories populaires, etc. [20]
Ce même refus de prendre en compte l’expérience historique, est complété par un manque de volonté d’écouter et de scruter l’expérience réelle des personnes révoltées, indignées ou insatisfaites. L’approche qui consiste à diffuser un discours pré-établi à travers les mass médias, au lieu d’écouter la parole des « opprimés », découle du mode d’organisation centralisé du parti trotskyste. La direction décide, la base exécute, après avoir tenté d’amender la ligne donnée. Ce procédé est d’autant plus appauvrissant que les petits partis trotskystes disposent d’une base sociale particulièrement étroite, qui n’a jamais atteint dix mille personnes. Pour comparaison, le parti social-démocrate allemand a dépassé le nombre d’un million d’adhérents dans les années 1970 et le
PCF approchait ce chiffre au milieu des années 1950.
Même si les trotskystes tenaient compte des observations de chacun de leurs membres, l’esquisse ainsi obtenue serait trop simple pour saisir la réalité complexe de la société et du monde. Le problème se pose d’abord sur un plan sociologique classique, purement descriptif, car femmes, immigrés, ouvriers, jeunes et précaires sont systématiquement sous-représentés dans les partis de gauche et d’extrême gauche.
D’un point de vue plus critique, il faut souligner que les militants trotskystes sont tout autant exposés aux effets fétichistes de la société bourgeoise que d’autres individus (les contraintes du travail salarié, la consommation, la société du spectacle, les formes autoritaires, etc.) sans pour autant vouloir l’admettre.
Enfin, le problème politique le plus évident réside dans le rapport que les militants entretiennent envers la majorité de citoyens qui ne sont pas organisés dans des partis.
Généralement, leur écoute se limite aux attentes principales, susceptible de nourrir des revendications ou des programmes électoraux, au mépris de tous les souhaits particuliers des individus. Les partis participent ainsi activement à la massification de la parole politique, qui cherche à organiser l’adhésion idéologique, au lieu d’entendre des arguments critiques.
Dans les organisations trotskystes, ce manque d’écoute est aggravé par la forte centralisation de l’information et d’une structuration de type sectaire, autour d’une direction qui pense déjà connaître la voie royale vers la « conscience de classe ». Depuis un demi siècle déjà, les textes de Walter Benjamin invitent les marxistes doctrinaires à abandonner l’idéologie totalisante du matérialisme historique, qui empêche de considérer ces souhaits particuliers et les contretemps de l’histoire. [21] Du contretemps, ce concept benjaminien, les trotskystes n’ont retenu que le mot, en titre d’une revue à la couverture grise. Un peu comme la Pravda, journal soviétique dont le seul mot vrai était son titre (La Vérité). [22]
Benjamin, lui, avait lancé une proposition qui n’était pas soluble dans le marxisme de parti : « Notre considération part de l’idée que la croyance psychorigide de ces politiciens dans le progrès, leur foi dans une “ assise de masse ”, ainsi que leur subordination servile à un appareil de parti incontrôlable, constituent trois aspects d’une seule et même chose. Cette approche vise à rendre compréhensible à quel point il nous en coûte d’abandonner notre pensée habituelle, au service d'un concept d'histoire qui évite toute complicité avec celui que ces politiciens continuent à défendre ». [23]
Pareille organisation verticale empêche aussi bien l’écoute que l’échange d’expérience. Malgré le discours marxiste, cette structuration rend également très improbable la compréhension dialectique des phénomènes contemporains. L’ouvriérisme - que les trotskystes ont hérité du
PCF - favorise la défense superficielle de la vie ouvrière, comprise comme un ensemble homogène qui fait la part belle à ses aspects problématiques ou aliénés. Dans ce cadre, la psychanalyse fut dénoncée comme une pratique petite-bourgeoise ; la critique écologique fut dans un premier temps perçue comme une attaque contre le mode de vie de la classe ouvrière industrielle ; la libération des femmes et la liberté sexuelle furent d’abord interprétées comme une menace de la famille ouvrière traditionnelle par le
PCF et les directions trotskystes, etc. [24] Ainsi, la
LCR a commencé à discuter l’homosexualité sur un plan politique à partir de 1995. Dans un livre à caractère auto-biographique de 478 pages, Daniel Bensaïd n’accorde pas une seule page au mouvement féministe, excepté deux notes en bas de page. [25]
Le problème de la répétitionD'un point de vue historique, il s'agit de voir que le
Nouveau parti anticapitaliste a déjà une longue histoire. La
LCR a activé cette formule à quatre reprises dans ses quarante années d’existence, avec plus ou moins de succès. En l’absence d’un bilan critique, l’histoire se répète.
- En 1938, les groupes trotskystes lancent la IVe Internationale sur une base léniniste, après avoir éloigné d’autres courants, constitués de socialistes critiques [26], en posant des conditions tellement draconiennes qu’aucun de ces partenaires politiques potentiels ne pouvait les accepter. Déjà, il en résulta une base sociale, militante et idéologique étroite, qui laissa ce courant sans prise réelle sur le cours de l’histoire.
- Après Mai 68, la
LCR a décidé d'abandonner toute perspective de mouvement large (poussant même l'opposition de gauche au sein du PSU de scissionner abruptement), au profit de la construction d'une organisation de cadres, de type léniniste. La démarche de l'époque consistait à créer des comités Rouge pour recruter des militants en accord avec la Ligue communiste, afin de renforcer le parti déjà existant qui a regroupé jusqu’à 7000 personnes.
- En 1988, cette démarche est réactivée aux côtés d’un transfuge du
PCF, sous le titre des « comités Juquin », à l’occasion des élections présidentielles.
- Après les grèves de l’hiver 1995, la même approche se trouve une nouvelle fois explorée, sous le nom "Entente pour l'espoir", supposée préparer la formation d'un "nouveau parti". L'écho fut faible et la formule s'est trouvée rapidement écartée, au profit de l'alliance électorale
LO-LCR, sur la base d’un programme trotskyste traditionnel.
- La quatrième relance en date concerne le Nouveau parti anticapitaliste de 2007, sur une base plus électoraliste que les précédentes tentatives. Le parti perd 660.000 voix, si l’on compare le NPA aux européennes de 2009 avec le score de la
LCR aux présidentielles de 2007. Cet échec le pousse à s'allier... au
PCF.
La répétition de la procédure, cet éternel « retour au même schéma » que chante le groupe NTM, signale que la direction trotskyste n’est pas en mesure d’abandonner ses principes organisationnels et idéologiques.
Sigmund Freud a saisi que le problème de la mémoire personnelle et du souvenir historique n’est pas limité à l’oubli, mais que la répétition sans cesse recommencée des mêmes erreurs et drames doit être lié à une incapacité plus profonde. Il pensait que le phénomène de la répétition obligée (Wiederholungszwang) exprime un refus fondamental de la vitalité et de la création. Ainsi, les personnes ou groupes concernées résistent au changement, refusent d’admettre la perte du passé, de leur propre passé, et se laissent aller à une certaine pulsion morbide. La modification des noms du parti ne change rien à cette situation, au fond. La structure subsiste et continue à parler la même langue, elle poursuit une écriture fatale [27]. Peut-être est-ce pour cela que les organisations trotskystes et leurs théoriciens sont incapables de tirer des bilans critiques de leur propre action.
DissonancesIl est vrai que le schéma trotskyste a été débordé de nombreuses fois, grâce à des courants dissidents, et surtout des mouvements démocratiques, des élans libertaires beaucoup plus vastes. Le trotskysme a été polarisé depuis ses débuts par un courant chaud, créatif, anti-bureaucratique et hétérodoxe, comme l’a été l’ensemble du mouvement ouvrier jusqu’en 1978. Ce sont pourtant toujours les bureaucrates qui l’emportent au sein des partis, pour des raisons analysées par
Max Weber et le sociologue anarchiste
Roberto Michels [28]. Les individus, collectifs ou courants qui ont tenté de porter une critique substantielle du dispositif trotskyste ont tous fini par sortir de ce cadre trop étroit, légitimant ainsi la critique historique des dispositifs de domination bureaucratiques, qui maintient la visée utopique de l’an-arkhé (absence de domination).
Face à la mauvaise foi des apologues trotskystes, qui tirent leur légitimité d’une tradition historique qu’ils n’assument pas, puisqu’ils en oublient même le nom, la dissidence doit fatalement ressembler à une charge contre des moulins à vent. Les principes léninistes y sont défendus sans citer
Lénine, mais les écrits de
Lénine servent parfois à détourner l’attention du léninisme.
Face aux novices, les dirigeants gardent le dernier mot, en citant
Marx. Face aux critiques, ils gardent le dernier mot grâce au marxisme, contre
Marx. Face aux théories critiques, ils jouent avec les mots ; face à l’expérience transgressive des mouvements, ils misent sur le fait accompli des appareils. Face aux anarchistes, ils invoquent l’esprit libertaire, face aux dissidents ils jouent la sanction bureaucratique. Aux activistes, contestataires et révoltés, les dirigeants trotskystes répondent qu’il faut s’organiser dans le parti, sous sa direction éclairée. Aux intellectuels critiques, ils lancent au contraire qu’il ne faut pas débattre, mais agir. Aux ouvriers, ils prêchent la raison et la théorie, aux intellectuels l’ouvriérisme et l’activisme. Contre les utopistes agissants, ils invoquent le matérialisme et le réalisme politique. Aux journalistes qui leur reprochent leur utopisme, ils parlent de la révolution possible.
Le parti a toujours raison. Il s’en sort, au vu de la relative faiblesse du débat politique et de la force des structures autoritaires ambiantes. Voilà pourquoi il convient de dresser l’oreille pour écouter ce que dit
Adorno : « La tradition se définit aujourd’hui comme une ardente obligation de trouver une forme nouvelle, une articulation poussée et cette obligation ne tolère rien qui soit donnée par avance de façon traditionnelle. Celui qui se soustrait à cela fuit le caractère inachevé de l’histoire qui continue à le solliciter. » [29]
Alexander Neumann
NOTES[1] Responsable de publication de Variations, revue internationale de théorie critique (http://www.theoriecritique.com) ; chargé de recherche en sociologie.
[2] Michel Foucault, « Méthodologie pour la connaissance du monde : Comment se débarrasser du marxisme ? », entretien avec Umi Yoshimoto réalisé en 1978, in : Foucault, Dits et écrits 2, Gallimard, 2001.
[3] Voir Jean-Marie Vincent, « Comment se débarrasser du marxisme ? » in : Autre Marx, ed. Page 2, 2001.
[4] Jean-Marie Vincent, « Le trotskysme dans l’Histoire », Critique communiste N°172, 2004, p.42.
[5] Sauf LO, refusant de soutenir le régime cubain « petit-bourgeois ».
[6] La presse trotskyste est archivée à la BPI, Centre Pompidou (p.ex. les hebdomadaires Lutte ouvrière, Informations ouvrières et Rouge).
[7] Jan Spurk, Soziologie des französischen Arbeiterbewegung, Argument, 1987.
[8] Lénine, Que faire ?, Editions sociales, 1971.
[9] Rosa Luxemburg, « Démocratie et dictature », in La Révolution russe, Spartacus, 1946 ; Oskar Negt, L’espace public oppositionnel, Payot, coll. Critique de la Politique, 2007 ; John Holloway, Changer le monde sans prendre le pouvoir, LUX, 2008.
[10] Voir Edwy Plenel, Souvenirs de jeunesse, Stock, 2003.
[11] Gyorgy Lukacs, Histoire et conscience de classe, Les éditions de Minuit, 1960, p.64.
[12] Ernest Mandel, Lenin und das Problem des proletarischen Klassenbewusstseins, Suhrkamp, 1970.
[13] Jean-Marie Vincent, « Face au parti ouvrier », in Max Weber ou la démocratie inachevée, Le Félin, 1998, p.93.
[14] O. Negt, op.cit.
[15] Rosa Luxemburg, op.cit. ; Roberto Michels, Critique du socialisme, Kimé, 1993.
[16] Karl Marx, Critique du programme de Gotha, Les éditions sociales, 2008, p.49.
[17] Trotsky, Le programme de transition, ed. Les bons caractères, 2005.
[18] Les partis ouvriers obtiennent 12 millions de voix contre 20 millions aux partis nationalistes et nazi, aux législatives libres de 1932. Voir Wilhelm Reich, La psychologie de masse du fascisme, Payot, 2003. Voir aussi Trotsky, Comment vaincre le fascisme ?, Buchet, 1973.
[19] Adorno, La Personnalité autoritaire, Allia, 2007.
[20] Le premier appel du « Nouveau parti anticapitaliste » (2008) affirme vouloir prendre en compte « les expériences du passé », mais il ne cite aucun de ces problèmes historiques auxquels le trotskysme s’est heurté. L’abandon d’un certain verbiage idéologique est suivi d’une prise en charge purement rhétorique de l’expérience.
[21] Benjamin, Thèses sur le concept d’histoire, Folio, 2001 ; Adorno, La dialectique négative, Payot, 2003.
[22] Daniel Bensaïd a tenté de présenter Benjamin comme un trotskyste et un « prophète armé », sans avancer le moindre argument qui accrédite cette thèse extravagante, voir son Walter Benjamin, la sentinelle messianique, Plon, 1990, p.158.
[23] Nous traduisons. Benjamin, “Über den Begriff der Geschichte” in Sprache und Geschichte, Reclam, 2000, p.147.
[24] Voir le rejet des apports de Freud, Fromm et Castoriadis dans des publications trotskystes des années 70, au sujet du Freudomarxisme (Ed. la brèche,
LCR) ou la défense trotskyste en du coït interrompu (Lutte de classes, LO) ; l’existence marginale puis l’arrêt des Cahiers du fémnisme de la
LCR ; les diatribes des revues Contretemps (N°4, 2002) et Lutte de classes (LO) contre l’écologie politique, etc.
[25] Bensaïd, Une lente impatience, Stock, 2004.
[26] Bensaïd, La fondation de la IVe Internationale, IIRF, 1989.
[27] Au sujet de cette problématique freudienne chez Derrida voir : Poetics today N.8 : « Freud and the semiotics of repetition », Duke University Press, 1987. Jacques Derrida, L’écriture et la différence, Seuil, 2003.
[28] Voir la correspondance de Weber, Briefe 1906/08, Mohr/Siebeck, 1990.
[29] Nous traduisons. Theodor W. Adorno, Dissonanzen, Suhrkamp, p.132, 2003.